Contribution La Griffe Lorraine

Rubrique Coups de coeur

Intérêt général de l’ouvrage ▲▲▲△△

Facilité de lecture ▲▲▲▲▲

Rapport avec le rite ▲△△△△

Étrange que des parents, athées avérés, prénomment leur fils Emmanuel, ici Schmitt chrétien pratiquant assumé, écrivain prolifique à succès. (On peut d’ailleurs être écrivain prolifique et sucer des cailloux, mais c’est une autre histoire).

Répondant à une invitation du Vatican en 2022, notre Emmanuel nous embarque en pèlerinage dans les pas du Christ sur cette terre sainte (je n’ose parler de Palestine). 

Lui, si méditatif, avouant une foi solitaire, nourrie de silences profonds, se retrouve mêlé pour dix jours à un groupe de réunionnais volubiles et infatigables sous la houlette du Père Henri, prêtre aux messes quotidiennes.

Emmanuel, écoutant sa voix intérieure, fait effort, s’accroche, lui qui eut, au cours d’une nuit mystique, la révélation de sa foi lors d’une reconnaissance dans le désert du Hoggar. On est loin du tohu-bohu pressant, malaxé par ce voyagisme touristico-marchandisé qu’offre ce voyage : Bus, contrôles sourcilleux, air saturé d’encens bon marché, poussière et mauvaise humeur… Parce qu’il faut les supporter, les sites gâchés, les grottes ou bergeries plaquées de marbre, surmontées d’une basilique en forme de religieuse (je parle de la pâtisserie).

Il faut la supporter la file indienne devant le tombeau du Christ où trente secondes et puis s’en vont… ; l’établi de l’enfant Jésus, la barque de Pierre (j’exagère) poussée par des moines qui ressemblent davantage aux diablotins fourchus des toiles de Bosch.

Fatigante Jérusalem et pourtant…

En prendre son parti, dépasser l’outré, ne garder que l’essence, ne pas considérer « l’Évangile comme un texte, mais le support d’un texte qui s’écrit toujours ».

C’est avec beaucoup d’humour, de lucidité et une infinie patience que notre pèlerin solitaire accomplira son chemin de croix, non en se révoltant, mais en s’adjoignant au groupe, en fin de compte à tous les chrétiens, mieux, à tous les hommes de ce bout de terre déchiré, divisé, haï par les uns, revendiqué par d’autres.

Loin du message d’amour et d’un universalisme que l’on serait en droit d’attendre ici, encore plus qu’ailleurs.

Ce bouquin est à offrir aux prétendants voulant mettre leurs pas dans ceux du Christ. On ne pourra pas dire qu’ils n’ont pas été prévenus. Cependant reste l’expérience vécue et « éprouver ce que l’on ne peut conceptualiser, ne pas éclaircir le mystère mais le percevoir intensément ».

S’apprivoiser, être le pèlerin de ce que l’on ignore…

Précédent
Précédent

LA SPLENDEUR DU MONDE

Suivant
Suivant

LES GUERRIERS DE L’HIVER